Le collège de Navarre


Fondé en 1304 par Jeanne de Navarre, épouse de Philippe le Bel, le collège de Navarre est l’un des plus anciens collèges de Paris. Tout comme le collège de Boncourt, ses locaux abritèrent ensuite l’ancienne École polytechnique. Aujourd'hui disparus, ils se situaient jadis le long de la rue de la Montagne-Sainte-Geneviève. Les tous premiers collèges apparaissent au XIIe siècle. Ils étaient consacrés à l’accueil et à l’hébergement de jeunes clercs sans ressources. D’ailleurs, on appelait alors les collèges des hôtels. L’enseignement fut dans un premier temps professé par des religieux avant de se laïciser en grande partie. Le rôle des collèges était de suppléer à l’université et au XVIe siècle l'on y suivait des cours d’un niveau qui n’avait rien à envier à la Sorbonne. Cette dernière, fondée par Robert de Sorbon, fut d’ailleurs à ses débuts un simple collège.

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François-Roger de Gaignières (1642-1715),
Relevé de la statue de Jeanne de Navarre qui, avec celle de Philippe IV le Bel,
encadrait le portail de la façade du collège de Navarre.
(Paris, Bibliothèque nationale)
Exemples précoces de statuaire royale dans la ville, elles furent détruites sous la Révolution.

La dramaturgie ne débute donc pas avec les auteurs de la Renaissance. Ses racines remontent au Ier siècle, lorsque Nicolas des Dames ou Ézéchiel s’inspiraient des grands épisodes bibliques pour écrire leurs œuvres fleuves. Au IIIe siècle, Saint Grégoire de Nazianze publiait les 2500 vers de sa Passion du Christ qui allait être l’ancêtre et la référence des mystères du Moyen Âge. Les plus anciennes traces écrites que nous conservons aujourd'hui date cependant du XIIIe siècle. Adam de la Halle fut l’auteur du Jeu de la feuillée en 1276. Avant lui, Jean Bodel nous léguait son Jeu de Saint Nicolas, écrit vers 1200. Quant à Rutebeuf, il écrivit Le miracle de Théophile, miracle dans lequel un homme livre son âme au diable et, se repentant, s’adresse à la Vierge pour le sauver.

Le collège de Navarre eut d’illustres élèves tels que le cardinal de Richelieu, Bossuet, Condorcet ou le poète André Chénier qui finira à l’échafaud de la Grande Terreur de 1794. Mais il fut également l’un des principaux foyers de l’humanisme naissant et ce n’est peut-être pas un hasard si l’on trouve dans la liste des régents Mathurin Cordier. En effet, cet érudit d’origine suisse fut le maître de Jean Calvin et se rallia lui-même à la foi protestante. Il ne fut pas le seul membre du corps enseignant des collèges à avoir eu des idées subversives au regard de la religion dominante de l’époque. Pierre de la Ramée dit Ramus, qui fut élève du collège de Navarre et devint en 1545 principal du collège de Presles, eut sans aucun doute une influence notoire sur ses élèves - dont certains membres de la Pléiade - et Gassendi. Il convient d’en dire deux mots tant l’impact de tels personnages fut puissant sur les esprits des auteurs du XVIe et XVIIe siècle. 

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Portrait de Pierre de la Ramée dit Ramus,
par Van Sichem Christoffel I (1546-1624),
estampe, fin XVIe siècle.

Pierre de la Ramée était originaire de Picardie. Né dans une famille de la noblesse déchue - son père était laboureur - il fugua à l’âge de huit ans pour se réfugier à Paris et y recevoir un enseignement. Par la suite, son tempérament et sa volonté indéfectible d’apprendre et de comprendre en firent un érudit parmi les plus respectés et controversés. Il proclama en effet que « Tout ce qu’avait dit Aristote n'était que fausseté » (1536) et s’en prit vivement à la scolastique. Il se convertit au protestantisme en 1560, brisa des statues de saints au collège de Presles et finit défenestré et jeté à la Seine lors des massacres de la Saint-Barthélemy, en 1572.

 

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