Au Jardin du Luxembourg


icon_walking_man_blue_16.png En entrant par la Rue Auguste Comte, dirigez-vous vers le bassin central du jardin pour retrouver sur votre chemin à droite la statue du marchand de masques.

Une jeunesse bouillonnante

Victor Hugo va habiter dans le voisinage du jardin pendant plus de 20 ans, entre 1809 et le printemps 1830 : impasse des Feuillantines, rue du Cherche-Midi, rue Sainte-Marguerite (actuelle rue Gozlin) dans la sombre pension Cordier (fév. 1815- sept. 1818), rue Bonaparte, rue de Mézières, rue du Dragon (seul immeuble encore visible), rue de Vaugirard et rue Notre-Dame-des-Champs. Au cours de ces années de jeunesse, le poète va rapidement prendre son envol pour devenir le chef de file de la nouvelle littérature. En 1827, il rédige la préface de Cromwell, qui devient le manifeste du romantisme, dans lequel il réfute tout dogmatisme pour prôner la liberté de l'art. Le vers doit être libre, franc, loyal […] sachant briser à propos et déplacer la césure pour déguiser sa monotonie d'alexandrin

Icon Blue Statue 16px.png  Le « Marchand de masques » de Zacharie Astruc, une œuvre réalisée en 1883 (située dans la zone est du jardin, non loin de l'entrée donnant sur le Panthéon). Ce marchand tient dans sa main gauche le masque de Victor Hugo.

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Zacharie Astruc, Le marchand de masques
Crédits: Wikimedia

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Zacharie Astruc, Le marchand de masques
Crédits: Wikimedia

Un mot sur la période correspondant à son logement du 11, rue Notre-Dame-des-Champs (avril 1827-mai 1830). Ce logement, aujourd'hui disparu lors du percement du bd Raspail, formait un bel ensemble champêtre avec une allée d'arbres, un jardin et une pelouse ornée d'un étang et d'un pont rustique. On était alors aux confins de Paris, près des barrières de Montparnasse, du Maine et de Vaugirard. C'est dans ce décor très romantique que le cénacle romantique, à la tête duquel se retenait le maître de maison, se réunissait. C'était un perpétuel va-et-vient. Edouard Turquety, un poète disciple de Lamartine, a laissé un témoignage très vivant sur une des nombreuses soirées organisées rue Notre-Dame-des-Champs. C'était le 10 juillet 1829. Ce soir-là, le poète avait réuni son "cénacle", pour leur lire des extraits de sa nouvelle pièce Marion Delorme, le 10 juillet 1829 – étaient réunis entres autres ce soir-là : Vigny, Sainte-Beuve, Dumas, Musset, Balzac, Mérimée :

Le salon du messie romantique était curieux à voir. Victor Hugo lisait lui-même et lisait bien. La pièce était intéressante et il y avait où admirer : mais dans ce temps-là la simple admiration était trop peu de chose. Il fallait s'exalter, bondir, frémir […] L'illustre Alexandre Dumas, qui n'avait pas encore fait schisme, agitait ses énormes bras avec une exaltation illimitée. Je me rappelle même qu'après la lecture il saisit le poète et, le soulevant avec une force herculéenne : « Nous vous porterons à la gloire ! » s'écria-t-il […] On servit des rafraîchissements : je vois encore l'immense Dumas se bourrer de gâteaux et répéter, la bouche pleine : Admirable ! Admirable ! Cette comédie, qui succédait si gaiement à ce drame lugubre, ne finit elle-même qu'à deux heures du matin.(cité par Léon Séché dans Le Cénacle de Joseph Delorme (1827-1830), Mercure de France, 1912).

Ces soirées étaient ponctuées de cris et de déchirements, de rires et de larmes. Le témoignage de Victor Pavie, écrivain et imprimeur, confirme celui de Turquety :

Ici l'on respirait comme une odeur de poudre, au sein de cette frémissante jeunesse, amie, ennemie d'un seul bloc, et, du même pas, s'élançant à la commune conquête. L'on eût dit un conseil de guerre où les plans se discutaient, où se répartissaient les rôles, où les rumeurs du dehors, assidûment recueillies, fomentaient les indignations et exaltaient les espérances. Il n'y avait pour trêve à ces démonstrations belliqueuses que les épisodes tirés des intimités du ménage, soit le cri d'un nouveau-né suspendu au sein de sa mère, et réveillé en sursaut par la violence des explosions, soit l'effarement des aînés courant, à l'heure du coucher qui sonne, s'assurer d'un refuge entre les genoux paternels.(Les Revenants : Charles Nodier, Angers, Germain et Grassin, 1883.)

Bientôt, Victor Hugo triomphera avec Hernani, dont la première eut lieu le 25 février 1830.

Mais revenons au jardin du Luxembourg au temps de la jeunesse de Victor Hugo. A cette époque, le jardin était plus grand que maintenant. Il occupait presque tout le triangle formé de la rue d'Assas, du boulevard Saint-Michel et la rue de Vaugirard. Le sommet du triangle étant l'actuelle place Julian (sur laquelle donne La Closerie des lilas). En 1782, à l'initiative du futur Louis XVIII, on amputa le jardin de la partie située à l'ouest de la rue Guynemer. 

Promenades amoureuses

icon_walking_man_blue_16.png Revenez sur vos pas pour traverser le parterre central et emprunter plus au sud l'allée du jardin parallèle à la rue Auguste Comte.

A l'époque où Victor Hugo logeait non loin du jardin, il aimait s'y promener. Le Jardin du Luxembourg occupe une place à part dans la vie du poète. C'est là, où jeune homme il rêva à l'amour… Son poème Adolescence (Toute la lyre, Hetzel, 1888), écrit un jour de septembre 1873 (il avait alors 71 ans), évoque son regard d'alors qui s'arrêtait sur les statues de femmes nues :

Mon regard violait la vague nudité
Des déesses debout sous les feuilles l'été;
Je contemplais de loin ces rondeurs peu vêtues
Et j'étais amoureux de toutes les statues; […]
Et, hardi comme un page et tremblant comme un lièvre,
Oubliant latin, grec, algèbre, ayant la fièvre
Qui résiste aux Bezouts et brave les Restauts,
Je restais là stupide au bas des piédestaux,
Comme si j'attendais que le vent sous quelque arbre
Soulevât les jupons d'une Diane en marbre.

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Mead Schaeffer, Illustration des Misérables, 1900

Et puis surtout c'est ici que son cœur vibra à la vue de la jeune Adèle Foucher : Dimanche 10 au Luxembourg septembre 1820. réciproqt., nota-t-il dans son Carnet. Ce qui signifie que Victor et Adèle, ce jour-là, se sont “réciproquement” jeté un regard au Jardin du Luxembourg, alors qu'Adèle s'y promenait avec ses parents. On peut d'ailleurs faire ici le rapprochement avec une scène des Misérables

Depuis plus d'un an, Marius remarquait dans une allée du Luxembourg, l'allée qui longe le parapet de la Pépinière, un homme et une toute jeune fille presque toujours assis côte à côte sur le même banc, à l'extrémité la plus solitaire de l'allée, du côté de la rue de l'Ouest [aujourd'hui la rue d'Assas]. […] Marius avait pris l'habitude machinale de se promener dans cette allée. Il les y retrouvait invariablement. […] Il trouvait l'homme à son gré, mais la fille assez maussade.

Cette allée correspond à celle qui est parallèle à la rue Auguste Comte. Marius va interrompre pendant six mois ses promenades. Et lorsqu'il y revient, il retombe sur ce couple qui l'attire :

Il alla droit à « son allée », et, quand il fut au bout, il aperçut, toujours sur le même banc, ce couple connu. Seulement, quand il approcha, c'était bien le même homme; mais il lui parut que ce n'était plus la même fille. La personne qu'il voyait maintenant était une grande et belle créature ayant toutes les formes les plus charmantes de la femme à ce moment précis où elles se combinent encore avec toutes les grâces les plus naïves de l'enfant; moment fugitif et pur que peuvent seuls traduire ces deux mots : quinze ans. […]

Et puis, un jour de printemps :

Un jour, l'air était tiède, le Luxembourg était inondé d'ombre et de soleil, l'air était pur comme si les anges l'eussent lavé le matin, les passereaux poussaient de petits cris dans les profondeurs des marronniers, Marius avait ouvert toute son âme à la nature, il ne pensait à rien, il vivait et respirait, il passa près de ce banc, la jeune fille leva les yeux sur lui, leurs deux regards se rencontrèrent. […]

Comme se sont rencontré les yeux d'Adèle et de Victor, le 10 septembre 1820. Ils avaient alors respectivement 17 et 18 ans. 

Toujours dans les Misérables, à la fin du récit, le jardin du Luxembourg sert une nouvelle fois de décor dans la scène où l'on voit les deux petits demi-frères de Gavroche, abandonnés à eux-mêmes, qui errent dans le jardin. La scène se passe au moment de l'insurrection des 5 et 6 juin 1832 – le peuple de Paris s'était soulevé à l'occasion des funérailles du général Lamarque (tué dans l'épidémie de choléra), une des grandes figures de l'opposition républicaine - : 

Le 6 juin 1832, vers onze heures du matin, le Luxembourg, solitaire et dépeuplé était charmant. Les quinconces et les parterres s'envoyaient dans la lumière des baumes et des éblouissements. Les branches, folles à la clarté de midi, semblaient chercher à s'embrasser. Il y avait dans les sycomores un tintamarre de fauvettes, les passereaux triomphaient, les pique-bois grimpaient le long des marronniers en donnant de petits coups de bec dans les trous de l'écorce. Les plates-bandes acceptaient la royauté légitime des lys ; le plus auguste des parfums, c'est celui qui sort de la blancheur. On respirait l'odeur poivrée des œillets. Les vieilles corneilles de Marie de Médicis étaient amoureuses dans les grands arbres. Le soleil dorait, empourprait et allumait les tulipes, qui ne sont autre chose que toutes les variétés de la flamme faites fleurs. Tout autour des bancs de tulipes tourbillonnaient les abeilles, étincelles de ces fleurs flammes. Tout était grâce et gaîté […].
Les statues sous les arbres, nues et blanches, avaient des robes d'ombre trouées de lumière; ces déesses étaient toutes déguenillées de soleil; il leur pendait des rayons de tous les côtés. Autour du grand bassin, la terre était déjà séchée au point d'être presque brûlée. Il faisait assez de vent pour soulever çà et là de petites émeutes de poussière. Quelques feuilles jaunes, restées du dernier automne, se poursuivaient joyeusement, et semblaient gaminer.
L'abondance de clarté avait on ne sait quoi de rassurant. Vie, sève, chaleur, effluves, débordaient ; on sentait sous la création l'énormité de la source […] on sentait la prodigalité de l'inépuisable ; et, derrière cette splendeur comme derrière un rideau de flamme, on entrevoyait Dieu, ce millionnaire d'étoiles.


Ce qu'on peut admirer dans l'extrait, c'est le merveilleux poète de la nature. Hugo s'émerveille devant les beautés multicolores de cette nature. Il y puise un oxygène bienvenu pour le lecteur, cette scène se passant juste après la mort de Gavroche sur les barricades. Pour Hugo, le jardin est un lieu de calme et de sérénité, en plein cœur de l'activité trépidante de la ville. Il est intéressant de noter qu'une scène de jardin est toujours située dans les Misérables, après une scène d'action intense. Le rythme du récit n'est pas laissé au hasard… Après la tension de l'action vient le répit offert par le spectacle de la nature. Et puis cette nature en plein éveil est le signe de la présence divine. Il l'avait déjà exprimé à plusieurs reprises, notamment dans cette lettre à sa femme Adèle (datée du 6 septembre 1837) : c'est un beau et glorieux livre que la nature. C'est le plus sublime des psaumes et des cantiques. Heureux qui l'écoute.

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Denis Puech, Statue de Charles Augustin Sainte-Beuve
Crédits: Jan Nicholls, via Wikimedia, 2014

L'« ami » Sainte-Beuve

icon_walking_man_blue_16.png Rendez-vous à la statue de Sainte-Beuve (1804-1869) située vers la fin de cette même allée

Nous allons donc maintenant évoquer les relations entre le critique et Victor Hugo. Ils se rencontrent, suite aux deux articles élogieux qu'écrit Sainte-Beuve dans le Globe en janvier 1827, à l'occasion de la parution des Odes et Ballades. Sainte-Beuve habite alors avec sa mère au 94 de la rue de Vaugirard, juste à côté des Hugo qui habitent le 90. Hugo rend visite au critique pour le remercier. Ne le trouvant pas, il laisse sa carte de visite. Le lendemain Sainte-Beuve est accueilli pour la première fois chez les Hugo. Très vite une amitié forte se noue entre les deux hommes : Sainte-Beuve est admiratif du poète, Hugo est sensible à l'œil critique de son nouvel ami. Mais la femme du poète allait s'interposer entre eux. En effet, Sainte-Beuve va tomber assez vite amoureux d'Adèle. Quant à Victor Hugo, il ne réalisera que tardivement l'idylle qui se joue sous ses yeux. Les premiers signes de la rupture se manifestent au moment de la sortie d'Hernani, en février 1830. Quelques jours avant la première de la nouvelle pièce de théâtre de Victor Hugo (le 25 février 1830), Sainte-Beuve lui envoie une lettre le prévenant qu'il renonce à faire la critique de sa pièce. Le post-scriptum, écrit avec emportement, révèle son amour pour Adèle. Pourtant l'amoureux devra attendre encore au moins deux années avant d'avoir Adèle dans ses bras. Celle-ci va d'abord fermer la porte de sa chambre à son mari, après la naissance d'Adèle (dont le parrain sera Sainte-Beuve), en juillet 1830. Adèle II (pour la distinguer de la femme de Victor Hugo) est le 5ème enfant du couple, après Léopold-Victor (mais qui meurt peu de temps après sa naissance), Léopoldine, Charles et François-Victor. Mme Hugo en a assez de ces grossesses à répétition et du fort tempérament de son mari. Sainte-Beuve va alors faire une cour assidue à Adèle jusqu'à ce qu'ils deviennent amants en 1832 ou 1833. La passion fut alors réelle et partagée : les deux amants s'écriront jusqu'à trois fois par jour au cours des années 1831/32/33. Son amour pour Adèle Hugo va lui inspirer son unique roman Volupté (1834) et sa réplique en vers, le Livre d'amour (1843). Auparavant il lui avait dédiée ce poème paru dans Les consolations (Urbain Canel et Levavasseur, 1830) : 

[…] Vers trois heures, souvent, j'aime à vous aller voir;
Et là, vous trouvant seule, ô mère et chaste épouse!
Et vos enfants au loin épars sur la pelouse,
Et votre époux absent et sorti pour rêver,
J'entre pourtant; et vous, belle, et sans vous lever,
Me dites de m'asseoir; nous causons; […]

Quant à Victor Hugo, il va déverser son chagrin dans sa nouvelle pièce Marie Tudor écrite au cours de l'été 1833, au travers de la bouche de Gilbert – sa liaison avec Juliette semble lui avoir délié la langue sur sa crise conjugale - :

Du jour où je n'ai plus été aimé, j'ai été mort. Oh ! vraiment mort, Joshua ! […] Si l'on m'avait dit il y a deux mois : - Jane, votre Jane sans tache, votre Jane si pure, votre amour, votre orgueil, votre lys, votre trésor, Jane se donnera à un autre. En voudrez-vous après ? – J'aurais dit : Non ! je n'en voudrai pas ! plutôt mille fois la mort pour elle et pour moi ! et j'aurais foulé sous mes pieds celui qui m'eût parlé ainsi. – Eh bien si, j'en veux - aujourd'hui, vois-tu bien, Jane n' est plus la Jane sans tache qui avait mon adoration, la Jane dont j'osais à peine effleurer le front de mes lèvres, Jane s'est donnée à un autre, à un misérable, je le sais, eh bien ! C'est égal, je l'aime. J'ai le cœur brisé ; mais je l'aime. Je baiserais le bas de sa robe, et je lui demanderais pardon si elle voulait de moi. Elle serait dans le ruisseau de la rue avec celles qui y sont que je la ramasserais là, et que je la serrerais sur mon cœur, Joshua ! […] - Joshua ! Joshua ! C'est comme cela le cœur d'un homme qui aime. Vous croyez que vous tuerez la femme qui vous trompe ? Non, vous ne la tuerez pas, vous vous coucherez à ses pieds après comme avant, seulement vous serez triste.

Ce qui a également contribuer à éloigner les deux hommes, c'est le virage que prend la poésie de Victor Hugo. Ce que Sainte-Beuve appréciait dans les premiers recueils publiés, c'était surtout le poète intimiste et familier. Par contre il n'adhère pas du tout à l'aspect épique de son œuvre. Du fervent défenseur qu'il était à ses débuts, il va se transformer en critique sévère, il faut dire que la blessure de son amour insatisfait restera à jamais vive dans son esprit. En effet, très vite, l'amour d'Adèle pour lui s'essouffle. Et puis son mari ayant une amante connue de tous (Juliette est devenue sa maîtresse depuis le 19 février 1833), la jalousie réveille l'amour qu'Adèle lui porte encore. Et lorsque paraît chez Renduel, en octobre 1835, les Chants du crépuscule, Sainte-Beuve s'insurge du rôle donné par le poète à sa femme. Rassembler ces deux femmes dans la louange dans le dernier poème du recueil (Date Lilia), voilà ce qu'il ne supporte pas : 

[…] Oh! Qui que vous soyez, bénissez-la. C'est elle!
La sœur, visible aux yeux, de mon âme immortelle!
Mon orgueil, mon espoir, mon abri, mon recours!
Toit de mes jeunes ans qu'espèrent mes vieux jours!

C'est elle! La vertu sur ma tête penchée;
La figure d'albâtre en ma maison cachée; […]
Celle qui, lorsque au mal, pensif, je m'abandonne,
Seule peut me punir et seule me pardonne; […]

La discorde entre les deux hommes est alors définitive, Hugo allant jusqu'à réclamer un duel avec son ancien ami (mais qui n'aura pas lieu). Plus tard, lorsqu'en 1874 (donc, après la mort de sa femme morte en août 1868 et celle de Sainte-Beuve survenue en 1869), Victor Hugo découvrira à Hauteville-House la correspondance entre les deux amants, sa jalousie se réveillera. Il prendra alors la plume pour apostropher le mort :

A S.-B.
Que dit-on ? On m'annonce un libelle posthume
De toi. C'est bien. Ta fange est faite d'amertume;
Rien de toi ne m'étonne, ô fourbe tortueux!
Je n'ai point oublié ton regard monstrueux
Le jour où je te mis hors de chez moi, vil drôle,
Lorsque sur l'escalier te poussant par l'épaule
Je te dis : « N'entrez plus, monsieur, dans ma maison! »
Je vis luire en tes yeux toute ta trahison,
J'aperçus ta fureur dans ta peur, ô coupable,
Et je compris de quoi pouvait être capable
La lâcheté changée en haine, le dégoût
Qu'a d'elle-même une âme où s'amasse un égout,
Et ce que méditait ta laideur dédaignée;
On devine la toile en voyant l'araignée.

 (Océan. Tas de Pierres, Imprimerie Nationale, 1942).

Au sujet de cette relation tumultueuse, je laisserai le dernier mot à Victor Hugo, qui, sans doute voyait une juste explication à la haine de Sainte-Beuve à son égard, lorsqu'il écrira en 1876 : Sainte-Beuve n'était pas poète et n'a jamais pu me le pardonner

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