La rue Soufflot et les Jacobins


Du boulevard Saint-Michel à la rue Soufflot

La rue médiévale : En sortant de la Faculté de Médecine, reprenez la rue de l'Ecole de Médecine, à droite. L'étranglement de la rue vous donne sa dimension à l'époque révolutionnaire. Inchangée depuis le Moyen-Age, cela vous montre l'étroitesse de l'espace qui séparait l'Eglise des Cordeliers et la colonnade de l'Ecole de Médecine, qui se faisaient face. L'Eglise sera démolie entre 1795 et 1799 afin d'aménager une place devant le monument néo-classique. Au passage, admirez, au n°5, ce joyau du classicisme français du XVIIème siècle que constitue l'Amphithéâtre de Chirurgie. Premier collège de Chirurgie, il sera transféré dans le bâtiment néo-classique que nous venons de voir et laissera ces locaux à l'Ecole de Dessin. 

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Jacques Lemercier, "Chapelle de la Sorbonne", Paris, 1626.

Le boulevard Saint-Michel : vers le couvent des Jacobins. Vous débouchez sur le Boulevard Saint-Michel (ancienne rue de la Harpe, étroite rue médiévale à l'époque révolutionnaire) et ancienne limite médiévale du domaine de l'Abbaye de Saint-Germain.  C'était l'ancienne « via Inferior » de la Lutèce romaine percée au bas de la colline, parallèle à la « Via Superior », la rue Saint-Jacques en haut de la colline vers laquelle nous allons nous diriger. Ce nom de « Via Inferior » deviendra par déformation  «rue d'infer » ou «rue d'enfer ». Cette appellation subsistera pour la portion de la voie extra muros qui prolongeait la rue de la Harpe et nommée avenue d'Infer, ou d'Enfer, conduisant à la Porte d'Enfer. Cette avenue est devenue aujourd'hui, par jeu d'assimilation sonore, Avenue Denfert-Rochereau et la Porte, Place Denfert-Rochereau, du nom du héros de la Guerre franco-prussienne de 1870. Prenez à droite et longez le trottoir du boulevard Saint-Michel, vous suivez donc l'ancienne rue de La Harpe, étroite rue médiévale dont une portion demeure de l'autre côté du Boulevard Saint-Germain. Au n°44 vous passez devant l'ancien Collège d'Harcourt, devenu aujourd'hui le très renommé Lycée Saint-Louis où étudia Denis Diderot.  Au passage, admirez sur votre gauche, la Chapelle de la Sorbonne du début du XVIIème siècle : de style Jésuite, elle présente le premier dôme mis en évidence sur un monument à Paris. Réformateur de la Sorbonne et bâtisseur du Royaume, Richelieu y est enterré. Remontez jusqu'à l'intersection du Boulevard et de la rue Monsieur le Prince : les trois différents niveaux sur votre droite vous rappellent que vous êtes sur les murs et les fossés de la ville médiévale où se dressait l'ancienne Porte Saint-Michel. De cette porte partaient, vers le sud, le chemin d'Enfer et, vers l'ouest, le chemin de Vaugirard. 

La rue Soufflot : Du couvent des Jacobins au Club des Jacobins

Le couvent de Jacobins : Traversez le boulevard et remontez la rue Soufflot vers le Panthéon. Cette rue qui n'existait pas à l'époque révolutionnaire, était couverte par  le Grand Couvent des Dominicains qui s'étendait jusqu'à la rue Saint-Jacques où se trouvait l'entrée du couvent et de l'Eglise : parce qu'installé sur la rue Saint-Jacques le nom de « couvent des Jacobins » lui fut attribué. Il longeait l'enceinte médiévale formant diagonale entre la Porte Saint-Michel et la Porte Saint-Jacques, aujourd'hui de l'angle Soufflot/St-Michel à l'angle opposé Soufflot/Saint-Jacques. Seule une plaque, au n°14 de la rue Soufflot, vous rappelle que vous êtes à l'intérieur du couvent où les dominicains s'établirent en 1218 et qui était bordé au nord par la rue de Cujas . Très vite, la renommée de ce « couvent –collège », avec des théologiens et philosophes comme Albert le Grand et Thomas d'Aquin, s'étendra à toute l'Europe et développera un vaste patrimoine immobilier. Fermé en 1790, il ne résistera pas au projet urbanistique prévu autour du Panthéon par Jacques-Germain Soufflot pour créer le cadre nécessaire à la mise en valeur de son édifice. Les restes furent ainsi enlevés pour percer la rue Soufflot dans l'axe du Panthéon, dégageant une perspective sur sa façade.  

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Anonyme, "Comité central de salut public, an II". Aquarelle, Paris, Bibliothèque nationale de France, 1793.

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Jean Baptiste Louis Massard,"Grand convoi funèbre de leurs majestés les jacobins en leur vivant, nos seigneurs et maîtres décédés en leurs palais de la rue St Honoré", Paris, Bibliothèque Nationale de France, 1792.

Le club des Jacobins : Ce couvent des Jacobins  allait donner son nom au club le plus influent de la Révolution et deviendra le nom le plus célèbre de la période révolutionnaire. La Société des Amis de la Constitution, ex-club breton, deviendra célèbre sous le nom de club des Jacobins, bien que n'étant pas installé dans ce couvent de la rue Saint-Jacques mais dans son annexe établie sur la Rive droite non loin des Tuileries, au 330 de la rue Saint Honoré (à l'emplacement aujourd'hui du Marché Saint Honoré). C'est par ce biais que le nom de Jacobins s'attacha à ce club qui eut une influence considérable sur le cours de la révolution. Ils développèrent 1200 clubs en province. Voisin de la Convention qui siégeait  à proximité dans la salle du manège des Tuileries, il était lié aux Montagnards et Robespierre en fut son grand animateur. Il fut fermé en 1794 après la chute de Robespierre et disparut en 1807 pour créer la  place du Marché Saint Honoré. C'est ainsi que ce nom  de « Jacobins » restera  attaché davantage à la période révolutionnaire qu'à l'ordre religieux : la notoriété des révolutionnaires « jacobins » éclipsera celle des moines.

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Malapeau, Duplessi-Bertaux, "Clôture de la salle des Jacobins : dans la nuit du 27 au 28 juillet 1794, ou du 9 au 10 thermidor, an 2 de la République", Paris, Bibliothèque Nationale de France, 1802.

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Jérôme Pétion,  "Je suis entre le peuple et la loi : J'ai des principes un Caractère et des Confrères jacobins", Paris, Bibliothèque Nationale de France, 1792.

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Duplessi-Bertaux, Berthault, "Robespierre amené blessé, dans l'anti-salle du Comité de salut public : le 28 Juillet 1794, ou 10 Thermidor An 2.eme de la Republique", Paris, Bibliothèque Nationale de France, 1802.

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Barbier, Sloane, "L'arrestation de Robespierre", Paris, Bibliothèque Nationale de France, 1796.

De la rue Saint-Jacques  au Panthéon : Remontez jusqu'à la rue Saint-Jacques et remarquez, en la traversant, son  tracé rectiligne, inchangé depuis le ler siècle avant J.C. : c'est l'ancienne Via Superior , celle du haut de la colline qui au Sud se dirigeait vers Orléans et Lyon et au Nord en descendant vers le passage sur la Seine vers le Nord de la Gaule et la Belgique. La Via Inferior (Boulevard Saint-Michel) d'où nous venons, au bas  de la colline, avait dédoublée la Via Superior, vite encombrée par un important trafic : les deux voies se rejoignaient avant la Seine. Vous arrivez sur la Place du Panthéon. 

                     

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